Chroniques


Le fantasme et le jeu vidéo

Rédigé par Jarps       dans  Lugeekosophie       13 Juillet 2014

Quand nous parlons de fantasmes, le premier (sinon le seul) truc qui nous vient à l’esprit, c’est la catégorie que nous préférons sur Youporn. Alors, plutôt « redhead », « teen » ou « BDSM » ? Sauf que nos esprits étriqués aiment se limiter à cette vision sexuelle du mot, sans aller chercher plus loin.

Maintenant que j’ai attiré votre attention en parlant de sexe, nous allons pouvoir commencer la leçon. Rangez vos magazines douteux, sortez vos cahiers, et écoutez-moi bien.
« Représentation imaginaire traduisant des désirs plus ou moins conscients ». Voici la définition que nous donne le Larousse (en ligne, je n’ai pas de vrai dico sous la main). Nous avons donc deux types de fantasmes : le conscient, et l’inconscient. Cependant, ce cher Sigmund Freud s’est attaché à montrer le caractère fondamentalement identique de toutes ces productions en les rapportant, en dernière extrémité, à l’accomplissement de désirs inconscients. Pour faire simple, ce que vous croyez être un désir conscient est en fait au service de vos envies inconscientes. Tordu, hein ?

Et le jeu vidéo dans tout ça ? On n’est quand même pas là juste pour une belle branlette intellectuelle non ? On va parler de toutes ces superbes bimbos à gros seins à moitié dénudée (merci aux jeux de bastons japonais) ? De la nouvelle Lara Croft presque violée ? Des héros baraqués comme des Mister Universe ?

11 Alors, plutôt Lara ou Nathan Drake?

Bien sûr qu’on va en parler! Mais pas trop, parce que contrairement à ce que notre entrejambe aimerait croire, le fantasme ne se situe, une fois encore, pas seulement dans nos envies de gros lolos ou de beaux gosses. Ces divers éléments, que l’on peut apprécier comme critiquer, sont l’évidente démonstration d’une utilisation de nos envies par les développeurs/éditeurs pour que l’on apprécie leurs jeux. Parfois à tort, parfois à bon escient, l’utilisation de ces fantasmes sexuels ou de ces modèles de virilités que Freud analyseraient comme un palliatif à une masculinité vexée, sont des arguments de vente. Rarement plus, rarement moins, même s’il y a évidemment des exceptions.
Là où le jeu vidéo est salvateur, en terme de réalisation de fantasmes, c’est qu’il peut offrir au joueur ce qu’il désir, et aussi ce qu’il ignorait désirer.

Je m’explique. Pourquoi, outre le besoin de détente, jouons nous aux jeux vidéo ? Pour s’affranchir de nos conditions du réel. Pour pouvoir voler, être un super héros, être un méchant, pour affronter des dragons plutôt que notre comptable, pour être un pilote de kart, pour être un grand séducteur plutôt que se prendre des râteaux en boites, pour être un héros, sauveur de la galaxie, plutôt qu’un employé lambda bouffé par son quotidien. Bref, pour être, pendant quelques temps, quelqu’un d’autre que nous même. Si nous le voulons, si nous le désirons, il s’agit donc d’un fantasme conscient. Un fantasme assouvi par le fait de jouer.
Ce désir subi un nombre important de variable, et déclinaisons : le joueur joue-t-il pour assouvir un besoin de violence, un défoulement ? Pour profiter de la vitesse sans prise de risques ? Pour mater des jolies filles ? Pour incarner un personnage extraordinaire ? Nous pouvons en venir à la conclusion suivante : le fantasme du sujet détermine le type de jeu qu’il choisira. « Dis-moi à quoi tu joues, je te dirais ce qui te fais rêver ».
C’est aussi à cela que l’on reconnaît les meilleurs jeux : ce sont ceux qui sont capable de nous faire assouvir plusieurs fantasmes en une seule expérience, incluant parfois des fantasmes inconscients !
Lu comme ça, c’est tout bénef pour tout le monde. Malheureusement, les choses ne sont pas aussi simples. Il ne s’agit là que de désirs assouvis par procuration. L’absence de sensations, la conscience de l’écran présent entre nous et l’aventure que nous aimerions tant vivre, génèrent en l’être humain la frustration de ne pas profiter totalement de son expérience. A la fin de la partie, lorsque l’écran s’éteint et que la réalité revient, nous sommes livrés à la triste pensée que rien n’était vrai, et que ces fantasmes que nous espérions assouvis sont toujours là.

Pire, comme Freud le disait, la frustration augmente le désir ! Plus vous êtes conscient de la non-réalisation de votre fantasme, plus il vous obsédera. Car c’est l’objet du désir qui est le moteur du désir (Aristote), et plus nous l’avons sous les yeux, plus nous le voulons ! Si votre fantasme le plus absolu, c’est de coucher avec Scarlett Johansson, allez voir tous ses films ne calmera en rien votre désir, même si vous avez l’impression de l’avoir assouvi pendant la durée du spectacle.

Sigmund FreudDites “Bonjour” à papa Freud!

Pour terminer la séance, nous allons nous penchez sur un cas ignoré jusqu’à maintenant. C’est bien beau de parler des joueurs et de ce qu’ils veulent, mais les développeurs, quelqu’un pense à ces pauvres bougres ? Le jeu est, pour eux aussi, un exutoire à leurs fantasmes, la possibilité de rendre virtuel ce qu’ils souhaiteraient voir réel. Il est d’ailleurs étonnant qu’on n’ait pas encore de jeux ou il est possible de faire l’amour avec l’actrice américaine mentionnée ci-avant, vous voyez ce que je veux dire ? Confrontés aux mêmes problématiques de frustration que le joueur, ils ont cependant la satisfaction d’être acteurs de l’assouvissement de leurs fantasmes, plutôt que spectateurs. Reste la question de savoir à quel point peuvent-ils être assouvis, quand la création du jeu est soumise au contrôle d’un éditeur, d’une direction, et qu’elle rassemble un nombre plus ou moins important d’individus, ayant chacun d’eux leur dose de désirs à satisfaire.

Nous en avons donc terminé avec cette problématique. Je suis navré pour tous ceux qui pensaient pouvoir se toucher la nouille à la lecture du sujet. Vous aurez peut-être la satisfaction d’avoir l’esprit un peu moins étriqué qu’il y a dix minutes, et la frustration de votre désir sexuel inassouvi. Mais je nie toute responsabilité la dedans. Rendez-vous la prochaine fois pour notre cours sur la violence dans le jeu vidéo, et profitez-en pour apporter un exemplaire de « Tatannez-vous la tronche entre amis ».

scarlett_johansson_2013-wideJe vois pas du tout de quel fantasme vous voulez parler !

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A propos de l'auteur :

Jarps

Jarps n'aiment pas l'IRL. Jarps préféreraient sentir le poids d'une armure sur ses épaules que celle d'un costard-cravate . Alors, Jarps s'évadent dans le multivers vidéo ludique qui remplit sa tête de rêves...(oui, tout les verbes sont au pluriel, on est plusieurs dans ma tête)

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